L’optimisme inspirant de Marion Debruyne, doyenne de la Vlerick Business School

31 mars 2023

« L’optimisme est un devoir moral ». Cette devise philosophique du 18e siècle est également le titre sous lequel Marion Debruyne, doyenne de la Vlerick Business School, a fait part de sa perspective pleine d’espoir lors du Dierickx Leys Private Bank Outlook 2023. C’était l’occasion idéale pour une interview inspirante sur le leadership, l’esprit d’entreprise et l’investissement en période de permacrise. 

L’optimisme est un devoir moral, comme le disait Kant dès le 18e siècle.                            Pourquoi avoir choisi ce titre aujourd’hui?                                                                                         Marion Debruyne: « Parce que c’est un credo personnel. J’y crois vraiment. Même en dehors du contexte actuel. J’ai toujours eu ce credo dans la vie. L’optimisme est le moteur de tout changement, car si vous ne pensez pas qu’une amélioration est possible, vous ne prendrez pas l’initiative. Si vous ne vous concentrez que sur les menaces, vous n’oserez pas entreprendre. Ou bien le négatif finira-t-il par devenir une prophétie qui se réalise?

L’optimisme représente un défi à une époque tellement bouleversée: tensions géopolitiques, guerres, inflation, questions relatives à l’économie, pandémie mondiale à laquelle nous avons survécu, enjeux climatiques, etc. Ce n’est pas un hasard si « permacrisis » (permacrise) est devenu le mot britannique de l’année 2022 (pas si joyeuse). En tout cas, il exprime le sentiment qui prévaut. Nous ne pouvons donc pas sombrer dans le pessimisme. Pour les dirigeants, les entrepreneurs et les investisseurs en particulier, il est important de continuer à voir la lumière au bout du tunnel. Malgré tout, nous constatons tout de même d’énormes progrès dans l’ensemble. »

Quelle est la principale leçon à tirer de la crise du coronavirus?                                                      « En résumé, je pense qu’il y en a deux.

Première leçon: en raison de la crise du coronavirus, nous avons pu constater à quel point l’économie et la société sont étroitement liées. Pour ma génération, c’était vraiment la première fois. Quand la société s’arrête, l’économie s’arrête également. Et inversement. Nous ne réfléchissons pas souvent à cette interdépendance pourtant naturelle. Nous avons dû regarder la réalité en face.

Dans ce cadre, nous constatons une tendance à long terme: la question de notre contribution à la société devient plus pressante. Les plus jeunes générations sont proportionnellement (beaucoup) plus sensibles à la réponse que vous leur donnez en tant qu’entreprise ou marque.

Deuxième leçon: si quelqu’un avait prédit que nous allions arrêter la société à grande échelle et la faire redémarrer ensuite, tout le monde aurait pensé que cela ne marcherait jamais. Bonne nouvelle: ça a marché. »

Quelles sont les clés de la reprise?                                                                                                          « Elles se trouvent dans les grandes tendances de notre économie: la digitalisation, la durabilité et l’innovation. Des tendances dont vous pouvez tirer parti, mais vous pouvez aussi aller plus loin. Elles ne sont pas nouvelles, mais elles se sont accélérées. Elles montrent surtout la direction que pourrait prendre la « transition vers un nouveau possible ». La relance ne consiste pas à revenir en arrière, « back to normal » comme on l’entend souvent. Il faut identifier et saisir les nouvelles opportunités.

Nous devons exploiter de nouvelles opportunités pour améliorer la situation.

Avant la crise, nous étions déjà convaincus que la digitalisation était incontournable. Nous ne nous en rendons vraiment compte que maintenant: comment aurions-nous pu survivre à la crise mondiale du coronavirus sans elle?

L’innovation repousse les limites des possibilités. Mais sommes-nous dans une bonne période pour l’innovation?                                                                                                                                        « Oui, tout à fait. Mais certains veulent revenir à la situation d’avant. Se tourner vers ce qui est familier et ce qui a fait ses preuves. Je le remarque, par exemple, dans les conversations sur le travail hybride ou dans les débats sur le développement durable. Certains y voient surtout des contraintes en matière de croissance. Mais vous pouvez aussi envisager les choses différemment et opter pour l’innovation. Il y a encore beaucoup d’opportunités dans le domaine du développement durable.

L’optimisme implique-t-il aussi une certaine naïveté? Peut-être. Mais les licornes de l’avenir sont écologiques. Même dans leurs business models. Pensez à EnergyVision, Ekopak, Too Good to Go, etc.

La prochaine vague d’entreprises à forte croissance sera durable.

En ce qui concerne la digitalisation, nous vivons déjà la quatrième vague. L’IA y occupe une place centrale. Cette vague se reflète également dans nos innovations, telles que nos nouveaux centres de recherche Metaverse et Web3. »

Tout dirigeant est confronté à des contradictions et à des choix. Qu’en est-il aujourd’hui?    « Ce sont des paradoxes connus: des contradictions difficiles à résoudre et qui reviennent sans cesse. La contradiction entre le physique et le digital, l’agilité et la résilience, l’actionnaire et la partie prenante et, enfin et surtout, la performance (ou les bénéfices) et la finalité.

Un exemple ? La résilience (‘resilience’) est devenue l’un des thèmes de management les plus populaires après la pandémie. Cependant, l’agilité/la flexibilité reste tout aussi importante. En période d’incertitude, nous reportons les décisions et les investissements. Il pourrait cependant être judicieux d’agir alors de manière anticyclique.

Pour résoudre ces paradoxes, il est essentiel de réfléchir hors des sentiers battus. Il existe de nombreuses façons de relier les points entre eux.

Pour sortir d’un paradoxe, la créativité et l’innovation sont essentielles.

Quel est le point commun de ces « signes de temps »? C’est l’interconnexion entre l’économie et la société. Quel est le degré d’authenticité d’une entreprise ou d’une marque? Les clients vous évalueront sur ce point.

Source: diapositive de la présentation de Marion Debruyne « Optimisme is een morele plicht » lors de l’événement Outlook 2023.

Où en sommes-nous en matière de recherche et de développement?                                            « De manière générale, nous devons encore travailler sur l’innovation. Cependant, certaines de nos entreprises obtiennent de très bons résultats dans ce domaine. Avec un taux d’investissement de 3,52% (public et privé) du produit national brut dans la recherche et le développement, la Belgique est un leader en Europe. La conversion ultérieure de la recherche et du développement en innovation est un peu moins facile. Nous devons néanmoins être réalistes: 90% des innovations échouent. Il n’y a toutefois pas d’autre solution, car rester immobile, c’est reculer »

« Voir plus loin, c’est rentable »: c’est la devise de Dierickx Leys Private Bank. Dans quelle mesure est-ce aussi votre message?                                                                                                               « L’optimisme en tant que devoir moral véhicule le même message. Et en effet, la vision paie. Quoi qu’il en soit, je pense qu’il est judicieux d’associer finalité et bénéfices. Cela implique en tout cas d’avoir une vision à long terme. Il est rassurant de toute façon de déterminer la fonction, le rôle et la contribution de votre entreprise pour la société. Et c’est rentable.

Le credo de la Vlerick Business School le résume bien: Vlerick challenges you to live your dream, learn continuously and take the leap with confidence. »

Encore une dernière question. Vous intéressez-vous à la bourse, investissez-vous activement?  « Oui. Et non. Je m’intéresse bien sûr au monde des entreprises. Cependant, je n’investis pas activement dans les marchés boursiers. Je préfère laisser cela à d’autres qui ont plus de temps à y consacrer. »

***

Qui est Marion Debruyne?

  • Doyenne, professeur titulaire et partenaire de la Vlerick Business School
  • Professeur adjointe à la Goizueta Business School - Emory University, États-Unis (2002-2005)
  • Chercheuse invitée Kellogg Graduate School of Management - Northwestern University, USA (2001-2002)
  • Visiting Doctoral Fellow à la Wharton School - Université de Pennsylvanie, États-Unis (2000-2001)
  • Docteur en sciences économiques appliquées, Université de Gand
  • Masters en marketing, Vlerick Business School
  • Master en génie civil, Université de Gand

En tant qu’ingénieure avec une formation en marketing, elle a toujours voulu comprendre l’impact de la technologie et de l’innovation sur les marchés commerciaux. Ses recherches portent sur les défis auxquels sont confrontées les entreprises lors de changements fondamentaux dans l’industrie et ses travaux ont été publiés dans de nombreuses revues académiques renommées. En 2015, Marion a remporté le prix CMI Management Book Of The Year dans la catégorie Innovation and Entrepreneurship avec son livre Customer Innovation. Elle a récemment coécrit un nouveau livre, Making Your Way, avec le professeur Katleen De Stobbeleir.

Marion est doyenne de la Vlerick Business School depuis 2015. Avant d’occuper son poste actuel, elle était directrice des masters. Elle a également une grande expérience en matière de formations de gestion et a donné des cours sur mesure à des entreprises de différents secteurs, du secteur pharmaceutique aux services financiers en passant par les soins de santé.

En plus de son travail universitaire, Marion est administratrice indépendante dans le conseil d’administration d’Ackermans & van Haaren, Guberna et Kinepolis.

https://www.vlerick.com/nl/zoek-professoren-en-experts/marion-debruyne

 Téléchargez ici le DLJ d'avril 2023 complet.

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